Cheikhou Diakite
Nationality: Senegal
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Cheikhou Diakité
Cheikhou Diakité est né à Saint-Louis du Séngal. Professeur de Lettres modernes, écrivain, poète, romancier et nouvelliste. Animateur d’ateliers d’ecriture (contes, poèsies, nouvelles). Il est l’auteur de plusieurs ouvrages dont : « Nafi la Saint-Louisienne »(Nominé Prix des régions francophones), « quand les Dinns ont soif »( nominé Prix des lycéens 2010), « comme une cuisine de seve de cailcedrat » Prix du salon du livre de Saint-Louis( CEPS 1998 ) et du recueil de poèmes ; ‘’Silences des ossuaires’’.
LE SONGE DES OSSUAIRES
Et le sage m’a dit :
« Si tu veux comprendre l’essence des choses,
Demande au fou ;
Il te montrera les chemins de l’absolu.
Et si le fou ne répond pas,
Suis le chien,
Il saura te guider sur les sentiers de l’insondable.
Et si le chien retourne sur ses pas,
Alors, observe les vers
Ils te mèneront vers les profondeurs de l’infini,
Là où commence l’intemporel.
Et si les vers se détournent sur ton passage
Tu parleras au vieux gardien
Il saura te déchiffrer,
Les caractères de la sublime bibliothèque.
Alors…
Peut être que tu comprendras
L’inanité de la vanité humaine.
Tu méditeras
Sur le sens du temps qui passe.
Tu méditeras
Sur la danse des ombres
Tu méditeras
Sur le chant des tombes
Alors…
Tu sauras que les véritables chefs-d’œuvre sont enfouis
Au fond de sépulcres.
La plainte des ossuaires
N’aviez vous pas entendu cette nuit
Le glapissement douloureux du chacal ?
Il rôdait aux abords du cimetière des suicidés.
Il était revenu témoigner de la douloureuse complainte des morts sans sépulture.
Et les corps dans les abyssales profondeurs océanes se projetaient encore sur les récifs du détroit de Gibraltar.
N’aviez vous pas entendu cette nuit, les cris de l’hyène ?
Elle semblait épouvantée au milieu des euphorbes ténébreuses.
Elle psalmodiait le chant du voyageur perdu dans les sables infinis du Sahara, de Tombouctou à Taoudenit, de Tamanrasset à Marrakech.
N’auriez vous pas vu dans le ciel assombri la danse des vautours :
Ils décrivaient dans ciel
La plainte silencieuse des enfants du Clair Pays.
NOCTURNE
La nuit est tombée
Tu as couvert ton corps translucide de satin noir
Et tes reflets moirés, ombres immatérielles,
Tels des doigts agiles ont caressé la nuit opaque.
La lune laiteuse s’est levée, et…
De toute la cime des eucalyptus, le vent susurrant dans les feuillages
A réveillé le monde du silence.
Les tamariniers dans leurs oscillations ont entamé l’étrange et solennelle danse des ombres et des tombes.
Pour apporter leur tribut à cette belle nuit étoilée,
Les insectes se sont joints à la sarabande musicale :
Au plus profond du silence, les vers se sont agités.
Et au dessus des sépulcres,
Lucioles et feux follets, virevoltants de milles feux se sont répandus,
Illuminant ce champ du regret, mais aussi de l’espérance.
Tout à l’heure, la ronde des milans et des vautours s’était estompée pour laisser la place au ballet velouté des chauves- souris.
Et de tout l’univers sépulcral dans une sublime symbiose
De bruits, de parfums et de couleurs, à la vie nocturne s’est réveillé le monde du silence.
Les larmes de la diva
Dans un coin du cimetière
Sous le grand tamarinier,
Entourée de roses flétries et de jasmins en dés errance,
Malmenée par le vent et la poussière,
Oubliée des êtres et des choses.
Là se trouve la tombe de la diva.
Sa voix s’est tue
Pour laisser chanter les tombes.
Sa voix s’est tue
Pour laisser danser les ombres.
Sur cette allée marquée par le silence et la rocaille
Ne passe que les pas trainants du vieux gardien.
Il y vient souvent.
Il a ce sourire amer.
Il a ce regard triste.
Il ne parle pas : il songe.
Parfois, deux gouttes de rosée
Viennent s’écraser sur son épaule.
A TONY
Amertume
Le Neverdead est en fleurs
Le Never dead est en pleurs
Au cœur de ma douleur
Ma sœur, ta peur
L’essence de ma rancœur
Je la ressens
Quand le Never dead est en fleurs
Quand le Never dead est en pleurs.
Au soir de la préhistoire
Au soir de la préhistoire de l’humanité
Mon peuple attardé attend son sauveur :
Il ne viendra pas parce qu’il gît en son sein.
Dans le tumulte des flots de sa sueur apprivoisée
Dans les veines de ses biceps éclatés
Sur son front rude et rebelle.
Sur le sourire de ses lèvres arrachées
Il est là, et pourtant…
Au soir de la préhistoire de l’humanité
Mon peuple attend toujours
Celui qui fut depuis toujours.
Entre la kora et la daba
A la pointe du fusil
Sur les vieux papyrus délabrés
Sur les vieilles palabres délaissées
Il est là !
Et pourtant !
Au soir de la préhistoire de l’humanité
Mon peuple attend depuis toujours
Celui qui fut depuis toujours
Prince des Afriques réunifiées
Laisse donc naitre ce Dieu qui dort en toi !
Qui vibre et palpite au rythme des accents de la liberté
Qui fait agir par delà l’au-delà la dynamique force sociale des héros morts
Tu es le chant tourné vers l’avenir
Tu es le prix du sang versé
Tu es le monument des valeurs nouvelles
Tu es l’hymne des peuples combattants
Tu es l’apologie de la grande peur
De la grande peur qui révèle le lâche
De la grande peur qui raisonne le brave.
Laisse donc naître ce Dieu
Qui dort en toi !
Car…
Au soir de la préhistoire de l’humanité
Mon peuple attardé, attend encore son sauveur.
PLEURE…MA SŒUR, PLEURE
Elle venait pleurer le soir au crépuscule
Mais la tombe restait inerte.
Alors, elle regardait le ciel comme pour y retrouver
Dans sa sempiternelle détresse un sublime réconfort
Elle ne percevait que le silence minéral des sépulcres
Femme battue ! Femme trahie.
Dans le silence de tes meurtrissures conjugales
Pleure ta douleur muette.
Pleure, ma sœur…pleure
Les larmes de toute une vie n’apaiseront pas tes peines
Ce soir encore je t’attendrai
Ce soir encore j’écouterai impuissant
S’écraser goutte à goutte
Sur la pierre la plainte de ton sang écarlate
Pleure, ma sœur …pleure
Car c’est de toi seule
Que viendra la délivrance.
Pleure, ma sœur …pleure.